La parole à une rédactrice en chef – Eva Van Driessche (Flair) : « Mon rêve a toujours été de travailler pour l’un ou l’autre magazine ‘populaire’. »

Eva Van Driessche, Flair

Cela fait près de trois ans qu’Eva Van Driessche est à la tête de Flair et Flair.be, tant côté néerlandophone que francophone. Ce n’est pas tout à fait une coïncidence si elle a endossé ses responsabilités juste après que le titre ait échangé Sanoma pour Roularta. Récemment, Flair a opéré un repositionnement. Une mise au point s’imposait donc.

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Diriger un périodique comme Flair s’apparente assurément à un numéro d’équilibriste continu. Il faut sans cesse rajeunir (afin de générer suffisamment d’influx), mais aussi veiller à ce que les lectrices plus âgées continuent à se sentir chez elles dans ses pages. Régulièrement, un tel exercice va de pair avec un repositionnement.

« Nous avons voulu opérer une mise au point et plus tôt dans l’année nous avons donc couplé un repositionnement sur le fond à une refonte formelle », raconte la rédactrice en chef Eva Van Driessche. « Nous cherchions à être plus branchés et ‘instagrammables’. Sur le fond, nous nous sommes demandés quels étaient les thèmes qui nous appartiennent vraiment. Tout de go, l’inclusivité et l’amour de soi reçoivent plus d’attention. Nous continuerons bien sûr à nous focaliser sur un journalisme de qualité à la sauce typiquement Flair. »

Introduction aux magazines

Flair a évidemment un rôle important à jouer dans le paysage magazine. « Il nous incombe d’introduire aux magazines les vingtenaires et trentenaires. Pour eux, Flair est souvent leur premier titre avant de passer, avec le temps, à Libelle ou Knack par exemple. » C’est justement cette cible, qui est très digitale dans son utilisation média, que Flair doit convaincre.

Un tel repositionnement a invariablement lieu après quelques années chez Flair. Pour Eva Van Driessche, il s’agit du premier depuis qu’elle est rentrée ‘au bercail’ chez Flair il y a trois ans de cela. Il y a plus de dix ans, elle avait déjà travaillé pour le titre, d’abord pour le site et puis pour le magazine. « Un tel repositionnement demande beaucoup de préparation », dit-elle. « Il est toutefois important de faire l’exercice régulièrement. On avance en effet bien vite en terme d’années. On ‘vieillit avec ses lectrices’. »

Liberté journalistique

Avec Sanoma et De Persgroep (où elle était responsable de Nina), Van Driessche compte déjà deux bastions magazine à son actif. Le poste au sein de Roularta était nouveau. « Je vois cet éditeur comme un enrichissement absolu, tant pour le titre que pour moi », confie-t-elle. « Roularta est fort attaché à la qualité. Journalistiquement parlant, nous avons beaucoup de liberté. Il y a bien sûr aussi la force au niveau du recrutement d’abonnements. La priorité est donnée à une relation durable avec le lecteur.

Il est vrai que pour Flair les abonnements sont moins importants parce que nous nous focalisons sur les jeunes, qui optent plus facilement pour des achats d’impulsion. Pendant le confinement, nous avons toutefois lancé Mesmagazines.be, un abonnement à la version imprimé d’un des magazines Roularta donnant aussi accès aux versions en ligne des autres titres. Nous étudions en ce moment comment encore développer cette approche ‘famille’. »

De Happy Endings à la caravane Flair

Le meilleur des deux mondes. Voilà ce qu’évoque le nouveau chez-soi de Flair. Cela ne signifie pas qu’il ne faut pas continuellement partir en quête de renouvellement, et ce, pas uniquement en termes de fond et de forme du magazine. Comme il convient à une marque forte, Flair s’efforce, à fur et à mesure, d’étendre son footprint. Mieux encore, le titre fut l’un des premiers, il y a des années de cela, à rassembler ses lectrices à l’occasion d’événements comme le Flair Shopping Day.

Cette fois encore, la diversification est clé. « Il faut interpeler son public cible, sans pour cela tout fourrer dans le print », explique Eva Van Driessche. « Ainsi, notre podcast Happy Endings a généré plus de 140.000 streams. Quant à notre caravane Flair – aménagée par Ikea –, elle offre aux lectrices une nuitée dans un endroit idyllique à un prix dérisoire. En trois heures de temps, toutes les nuitées étaient réservées pour un été tout entier. Nous avons aussi remplacé le Flair Shopping Day par Flair Chillax ; à cette occasion, nous amenons nos lectrices à découvrir une ville au travers de terrasses, d’une route Instagram, d’un itinéraire de shopping, etc. Cette année, nous ferons encore escale à Courtrai, Roulers et Ostende. »

De temps en temps, une telle diversification peut aussi se faire en print. Flair publie ainsi régulièrement des spéciales rédactionnelles. Pensez au Spécial Plantes, au Self Love Journal ou encore au livre de cuisine Recettes crapuleuses.

Encore beaucoup de pas digitaux à franchir

C’est justement ce mix qui, chez Eva Van Driessche, alimente la passion pour le média magazine. « Mon rêve a toujours été de travailler pour l’un ou l’autre magazine ‘populaire’, ce qu’on appelle les ‘boekskes’. Mes jobs de vacances chez Menzo et Humo m’ont bien vite fait comprendre que je ne pouvais pas utiliser ce terme, mais depuis j’ai aussi découvert que le print seul ne me suffit plus. J’estime qu’il est important de partir à la recherche des bons canaux pour entrer en contact avec son public cible. »

« À mes yeux, le digital sert alors de fil rouge. Je pourrais me plonger dans Google Analytics pendant toute une journée pour étudier ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas. Il y a encore tellement de pas que nous pouvons franchir au niveau digital. Nous pouvons encore développer la communauté et savons au quart de tour si quelque chose est bien ou non. Ce n’est pas un hasard si dans le print on ne voit pas encore vraiment l’impact de notre repositionnement, car cela prend du temps, mais qu’en ligne et sur les médias sociaux nous sommes submergés de réactions positives. »

Eva Van Driessche, Flair Eva Van Driessche, Flair

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